Addiction Toutes les addictions - Alcool, tabac, cannabis… Où en est la consommation des jeunes Français ?

Lancé en 1995 en Europe, et en 1999 en France, l’European School Project on Alcohol and other Drugs (ESPAD) constitue la plus grande base de données statistiques validées sur une longue période. Tous les quatre ans, au même moment et avec le même protocole dans une quarantaine de pays européens (35 en 2019), ce projet évalue les usages de drogues chez les jeunes.

Pour sa septième édition, il s’est appuyé, côté français, sur l’enquête nationale (EnCLASS), menée auprès de l’ensemble des élèves du secondaire.

Au total, en 2019, près de 100 000 adolescents européens âgés de 16 ans ont rempli en classe des questionnaires anonymes. Que nous apprennent leurs réponses ?

L’alcool chez les jeunes : dans la moyenne européenne

À seize ans, 80 % des jeunes Français (80 % des garçons et 79 % des filles) ont déjà expérimenté une première fois l’alcool. Par ailleurs, plus de la moitié en ont consommé lors des 30 derniers jours (54 % contre 52 %). Enfin, un gros tiers (34 %) ont bu au cours du mois passé au moins 5 verres en une seule occasion. On parle d’« alcoolisations ponctuelles importantes », ou API. Celles-ci concernent 36 % des garçons et 32 % des filles.

Ces chiffres n’ont pas changé de manière significative par rapport à 2015, exceptés en ce qui concerne les alcoolisations ponctuelles importantes : elles touchaient alors 27 % des filles. Ils sont dans l’ensemble comparables avec les données obtenues dans les autres pays d’Europe.

S’agissant de l’expérimentation de l’alcool, les jeunes Français se situent dans la moyenne : 79 % des jeunes Européens enquêtés ont déjà bu une boisson alcoolique.

Les chiffres les plus faibles sont ceux du Kosovo (29 %), de l’Islande (37 %) et de la Norvège (53 %), et les plus élevés sont ceux de la Tchéquie (95 %).

En ce qui concerne la consommation récente, c’est-à-dire au cours des 30 derniers jours, les jeunes Français sont au-dessus de la moyenne européenne, qui s’établit à 47 %. Cela vaut pour les garçons (54 % contre 47 % en moyenne au niveau européen) comme pour les filles (52 % contre 46 %). Dans ce domaine, ce sont l’Autriche (63 %), l’Allemagne (65 %) et le Danemark (74 %) qui arrivent en tête, alors que la Suède (25 %), l’Islande (11 %), et le Kosovo (10 %) occupent les dernières places.

Enfin, pour les alcoolisations ponctuelles importantes à 16 ans, la France est dans la moyenne européenne (34 %), loin derrière les pays en tête de classement – Danemark (59 %), l’Allemagne (54 %) et l’Autriche (49 %) – mais bien au-delà des derniers – Norvège (16 %), Kosovo (14 %) et Islande (8 %).

Le tabagisme : en recul partout

En France, le tabac fait moins d’adeptes que l’alcool à seize ans. L’enquête nous apprend que 45 % des jeunes (46 % des garçons et 44 % des filles) l’ont déjà expérimenté. Par ailleurs, 22 % d’entre eux (21 % et 22 %) en ont consommé lors du mois passé, et 12 % fument tous les jours au moins une cigarette (12 % et 11 %).

Par rapport à 2015, on note une nette diminution de l’expérimentation (45 % en 2019 contre 55 % quatre ans auparavant), aussi bien pour les garçons (46 % contre 54 % en 2015) que pour les filles (44 % contre 56 % en 2015). Mais le tabagisme quotidien, lui, ne semble pas baisser de manière significative (12 % contre 16 %).

Ces chiffres se situent légèrement au-dessus de la moyenne européenne, qui est de 41 % pour l’expérience d’une première cigarette à seize ans, et de 10 % pour le tabagisme quotidien.

Plus précisément, l’expérimentation du tabac à cet âge est plus faible (15 points au moins) à Chypre, en Suède, Norvège, Malte, et en Islande, et plus élevée (10 points de plus) en Italie, Lettonie, et Slovaquie. Quant à la consommation quotidienne des jeunes, elle est deux fois moins fréquente en Islande, Norvège, Malte, Suède, Pays-Bas et Irlande (entre 2 % et 5 %), et deux fois plus fréquente en Italie, Croatie, Bulgarie, Hongrie, Roumanie et Slovaquie (entre 18 % et 20 %).

Vers une homogénéisation des comportements

Depuis 1999, le tabagisme des jeunes diminue dans l’ensemble des pays d’Europe, avec une tendance à l’homogénéisation des comportements. C’est d’autant plus vrai pour la France, qui présentait au départ des niveaux plus élevés que la moyenne (Tableau I) pour l’expérimentation (77 % contre 68 %), le tabagisme mensuel (44 % contre 36 %) ou le tabagisme quotidien (31 % contre 23 %).

Soulignons que pour les mineurs, les cigarettes ne sont pas aussi accessibles partout. En France, la vente est normalement interdite aux moins de 18 ans, mais aux dires d’environ 60 % des jeunes Français, il est « facile » ou « très facile » de s’en procurer.

C’est au Danemark (79 %), puis en Suède, Pologne, Slovaquie et Tchéquie (plus de 70 %) que le tabac est le plus souvent perçu par les jeunes comme facile à obtenir, et au Kosovo (24 %) que cela paraît le plus difficile. Et moins de la moitié des jeunes enquêtés jugent la chose aisée en Roumanie (39 %), Ukraine (42 %), Géorgie (45 %), Islande (47 %) et Macédoine du Nord (49 %).

Cet article a été rédigé par Philippe Arvers pour le site The Conversation